quinta-feira, 4 de novembro de 2010

Catherine Deneuve em Bordeaux


Fonte/ Paris Match.
Avant-Premiére : the movie "Potiche"
A l’avant-première du film qu’elle est venue présenter à Lyon, un spectateur l’interpelle. « C’est gentil de vous être déplacée, ­madame Deneuve, mais j’aurais préféré voir Gérard Depardieu ! » Elle en rit encore. Elle adore rire. Lorsque, au dernier Festival de Cannes, elle pointe son nez à la soirée de « Vanity Fair », où sont réunis les plus grands noms de Hollywood, elle devient instantanément le centre de la soirée. « Ils doivent être étonnés de voir une vieille actrice française sortir de son placard ! » me dit-elle entre deux éclats de rire. Sa froideur blonde a longtemps mis une distance entre elle et le public. Irrésistible de drôlerie en bourge de province déjantée, à la dernière Mostra de Venise, après la projection de « Potiche », la salle lui fait une standing ovation. « Mastroianni la surnommait “la Prussienne”, me confie Gérard ­Depardieu.

Je trouve qu’il y a chez elle quelque chose d’aérien et de beau. On a souvent partagé nos larmes, et on se protège l’un l’autre. Catherine est pour moi une source permanente de bonheur. Je ne me permettrais jamais de la mettre dans une situation où elle risquerait d’être mal à l’aise. J’ai trop d’amour pour elle. C’est notre amour de la vie qui nous rapproche et qui fait que nous nous sommes aimés et que nous nous aimons ­encore. Si Sacha Guitry l’avait connue, il aurait écrit ses plus belles lignes. » Je me souviens, hier, quand nous ­attendions le Thalys pour Bruxelles, elle a commandé une bière légère, assise à la terrasse d’un café, gare du Nord, sa petite valise à côté d’elle. « La femme et l’actrice sont très proches, me dit François Ozon.

Catherine a une approche nerveuse
de la vie, elle a peur de la lenteur
Elle sait toujours exactement ce qu’elle veut. Dans son jeu comme dans la vie, elle ne triche jamais. En dehors du film, il nous arrive de parler d’amour. Elle n’a aucun préjugé, beaucoup de ­tolérance pour les amours difficiles. Elle dit d’ailleurs toujours qu’en amour il n’y a pas de règles et qu’il faut vivre toutes ses passions. » Elle se lève d’un bond, pour aller voir ce qui se passe. Les mains sur les hanches, elle scrute, ligne après ligne, le grand tableau d’affichage. Rien. Penaude, elle ­revient s’asseoir. « Si les gens la laissent sur son piédestal, me confie Thierry Klifa, tant pis pour eux. Le dernier jour du tournage de mon film “Les yeux de sa mère”, elle a décidé de faire un risotto au champagne pour toute l’équipe. Elle lançait la cuisson entre les prises. Et à 2 heures du matin, c’est elle qui faisait le ­service ! » Elle connaît le nom de toutes les fleurs. Hier, pour les Journées des plantes, elle est allée à Courson voir éclore le camélia ­Françoise-Dorléac, du nom de sa sœur disparue.

Elle connaît la boutique où on trouve les meilleures épices, le meilleur cordonnier, tous les petits bouges du quartier. Cinéphile, dès qu’elle a une heure ­devant elle, elle va au cinéma, pas en projection, mais dans une vraie salle, elle y tient, où elle fait la queue comme tout le monde. Lorsqu’elle a un problème avec quelqu’un, elle prend son téléphone et le règle elle-même. Invitée en direct sur une chaîne de télévision américaine, à la journaliste qui lui demande si ça ne la dérange pas de mettre encore de la fourrure, elle lui répond du tac au tac : « Et vous, ça ne vous dérange pas de vivre dans un pays où il y a encore la peine de mort ? » Le train est enfin annoncé. Elle enfile son ­blouson et se dirige d’un pas ­rapide vers son wagon, en fumant discrètement une dernière cigarette. Elle avait arrêté de fumer pendant dix ans, elle a repris bêtement.

Elle fume trop, elle le sait. Elle a ­emporté comme toujours, dans l’espoir de les lire, des tas de magazines « en retard », selon son expression, le « Libé » de la veille, qu’elle n’a pas encore terminé, et deux scripts. Très ancrée dans la réalité du quotidien, elle fait toujours passer la vie avant le ­cinéma. Elle préfère de loin aller au Salon de l’agriculture que dans les ­dîners parisiens. Elle n’est ­jamais où on l’attend. « Catherine a une personnalité hors normes, me confie son ami et agent, Bertrand de Labbé. Comme Hallyday, ­Depardieu ou Piaf, elle fait partie de ces gens qui ont le cœur qui bat plus fort et plus vite que la moyenne d’entre nous. Elle fait un métier où elle ­dépend du désir des autres. Elle pourrait être une femme soumise, mais elle ne l’a jamais été. Elle a transcendé le problème de l’âge mieux que la plupart des actrices, car elle a eu l’intelligence de toujours le devancer. Tout est centré sur elle, pourtant elle ne cesse d’envoyer de la lumière à ceux qu’elle aime. » Toujours pressée, elle oublie systématiquement quelque chose derrière elle.

Ce qu’elle ne sait pas encore, c’est qu’en faisant sa valise ce ­matin elle a oublié de prendre la robe qu’elle doit porter pour la ­cérémonie et ses bigoudis chauffants. Hier, c’était son stylo préféré chez le ­coloriste Christophe Robin ; ­aujourd’hui, son chargeur de téléphone qu’elle est sûre et certaine d’avoir laissé dans la salle de bains de l’hôtel de Bordeaux. Branle-bas de combat. Il est dans sa poche ! En le cherchant, les femmes de chambre ont retrouvé, sur son lit, un collier et sa trousse de maquillage. « Catherine a peur de la lenteur, de tout ce qui pourrait l’enliser, me confie le metteur en scène Benoît Jacquot. Elle a une approche ­nerveuse de la vie. Il y a chez elle quelque chose d’instantané, de très entier, de presque fruste. Dès lors qu’elle a décidé de larguer les amarres, elle y va. Mais, dans le fond, c’est une anxieuse toujours au bord du gouffre. On la dit autoritaire, je pense simplement que l’idée de changer d’avis l’angoisse. (Dany Jucaud par Paris Match).

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